Geonet, Marie
[UCL]
De Sutter, Pascal
[UCL]
Zech, Emmanuelle
[UCL]
Intérêt Le désir sexuel hypoactif (DSH) est une difficulté largement répandue parmi les femmes. Le concept de désir sexuel ainsi que ses dysfonctionnements sont difficiles à définir en raison de la dimension subjective importante. À cause de cette composante subjective, les facteurs psychologiques, et en particulier les dimensions cognitives, sont susceptibles de jouer un rôle important dans le développement et le maintien des dysfonctions sexuelles. Les processus à l’œuvre apparaissent complexes et des positions contradictoires existent. Elles seront passées en revue avec comme objectif de clarifier les différentes propositions liées au rôle des processus cognitifs en jeu dans les dysfonctions sexuelles féminines, particulièrement dans le DSH. Les futures cibles des interventions thérapeutiques seront également proposées. Méthode Une revue de la littérature des facteurs cognitifs dans les dysfonctions sexuelles et le DSH sera présentée. Ce tour de la littérature s’est effectué essentiellement à partir des moteurs de recherche PsycInfo et Medline, en s’intéressant aux études parues dès la fin des années 1970 jusqu’à 2011. La plupart des recherches recensées utilisent les critères du DSM-IV-TR (2000) pour établir le diagnostique de DSH. Les études empiriques relatées utilisent essentiellement sur des échantillons cliniques et contrôles. Les principaux mots-clés étaient : sexual, desire, sexuality, cognitive, beliefs and thoughts. Résultats Dans la population féminine générale, la prévalence du DSH se situe entre 24 et 43 %. Les facteurs à l’origine de cette problématique peuvent être biologiques, environnementaux ou psychologiques. Parmi les facteurs psychologiques, la littérature montre que les cognitions négatives jouent un rôle important dans les dysfonctions sexuelles féminines. Ces facteurs cognitifs sont composés de trois niveaux principaux qui vont permettre le traitement de l’information dans la sexualité mais aussi dans tous les domaines de la vie. Les cliniciens et les chercheurs s’accordent pour dire que les femmes souffrant de dysfonctions sexuelles présentent davantage des croyances négatives (par exemple, il n’est pas correct qu’une personne âgée ait des rapports sexuels, la sexualité ne peut servir qu’à la reproduction), en comparaison aux femmes sans difficulté sexuelle particulière. Ces croyances négatives les rendent plus vulnérables à des autoschémas critiques (par exemple, « Je suis incompétente ») quand elles font l’expérience d’un échec dans une situation sexuelle. Ces autoschémas négatifs, quand ils sont activés, entraînent des pensées automatiques négatives qui les empêchent de se focaliser sur le contexte érotique. Ces cognitions négatives peuvent être en lien avec leur propre image (par exemple, « Je ne suis pas assez belle », « Je dois être à la hauteur »), avec leur partenaire (par exemple, « Il me dégoûte ») ou en lien avec la relation de couple (par exemple, « Il va me quitter », « Il ne m’aime plus »). Ces pensées négatives activent alors des émotions comme l’anxiété, la honte ou la culpabilité. De plus, ces cognitions vont avoir un impact négatif sur la réponse sexuelle. En effet, plus les pensées négatives seront présentes, moins l’excitation sexuelle ressentie sera importante. En conséquence, au cours du rapport sexuel, les femmes vont être davantage centrées sur ces pensées plutôt que sur toutes les stimulations sexuelles (par exemple, caresses, contexte érotique…). Ce processus de distraction est présent également chez les hommes qui se concentrent sur des pensées négatives portant sur la performance sexuelle. Conclusion Les futures études empiriques devraient investiguer le contenu des croyances sexuelles, des autoschémas négatifs ainsi que des pensées automatiques, chez les femmes fonctionnelles et dysfonctionnelles. En outre, la plupart des études utilisent une méthode par questionnaires afin d’explorer les processus cognitifs. Cette méthode ne permet pas d’accéder aux processus inconscients. Pour réaliser une évaluation fiable de ces processus, les méthodes utilisées devraient inclure des tâches implicites. Au regard des interventions thérapeutiques concernant les facteurs psychologiques/cognitifs, nous proposons que les pensées automatiques négatives, les schémas sexuels ainsi que les croyances deviennent la cible thérapeutique, par la méthode de la restructuration cognitive. Une seconde stratégie concernant l’intervention thérapeutique pourrait cibler la distraction cognitive. Un entraînement à la pleine conscience pourrait être utilisé comme un outil permettant à la fois de moins se focaliser sur les pensées non érotiques et de porter davantage son attention sur les stimuli sexuels.
Bibliographic reference |
Geonet, Marie ; De Sutter, Pascal ; Zech, Emmanuelle. Les facteurs cognitifs dans le désir sexuel hypoactif féminin. In: Sexologies : revue europeenne de sante sexuelle - european journal of sexual health, Vol. 22, no.1, p. 10-18 (2013) |
Permanent URL |
http://hdl.handle.net/2078.1/136021 |