LA PLURIDISCIPLINARITÉ DANS LES SCIENCES DE LA VIE : UN NOUVEL OBSTACLE ÉPISTÉMOLOGIQUE, LA NON-LINÉARITÉ
Janine Guespin-Michel Camille Ripoll
il y a une difficulté évidente à faire progresser la pluridisciplinarité dans les sciences de la vie
Il y a un paradoxe croissant entre l’appel constant à la pluri¬ disciplinarité dans les sciences de la vie, qui en fait presque une “tarte à la crème” de la prospective scientifique, et la diffi¬ culté évidente à la faire progresser sur le terrain.
Les raisons en sont multiples, certaines sont bien connues, comme les répercussions toujours actuelles de la classifica¬ tion comtienne des sciences qui font notamment que les étudiants en biologie sont sélectionnés par l’échec en mathé¬ matiques, tandis que les étudiants des sciences plus “dures" ne reçoivent pas d’enseignement de biologie. D’autres sont à notre avis beaucoup moins souvent évoquées. Parmi elles, une terrible pomme de discorde, qui surgit dès que l’aspect temporel des phénomènes biologiques étudiés devient central, que nous désignerons par le qualificatif mathéma¬ tique de non-linéarité. “Placage totalitaire” pour les uns, preuve de l’incapacité de la science et de la mort du détermi¬ nisme pour les autres, l’utilisation d’un formalisme utilisant des équations différentielles non linéaires est diabolisée ou portée aux nues d’une manière qui ressort bien plus d’un débat idéologique que scientifique. Pourtant il s’agit d’une avancée majeure des sciences mathématiques et physiques du XXe siècle, dont les possibles applications en biologie ne peuvent pas être ignorées.
ASTER N° 30. 2000. Rencontres entre les disciplines, INRP, 29, rue d’Ulm, 75230 Paris Cedex 05