LES ENCEINTES GRECQUES D'HISTRIA : VERS UNE NOUVELLE APPROCHE ?

Pierre Dupont, Mircea Angelescu, Cécile Dubosse, Lionel Noca, Pierre Séjalon

À la mémoire de Maria Coja

Le système des fortifications grecques d'Histria n'a encore fait l'objet pour l'instant que d'un bref essai de synthèse, publié en 1982 sous la plume de Maria Coja1. Aboutissement d'une longue série de sondages, pratiqués dans le cadre de l'exploration systématique du "Plateau" ouest depuis l'immédiat après-guerre jusqu'à la fin des années soixante-dix, ce travail retrace les grandes étapes de développement des lignes de défense du site entre l'époque archaïque et l'époque hellénistique.

Selon M. Coja, il y aurait eu édification de trois enceintes concentriques successives, en net retrait l'une par rapport à l'autre sur le front ouest [Fig. 1]. Un ensemble urbain unitaire (quoique de densité très inégale, semble-t-il) se serait développé à partir du promontoire où s'étaient installés les premiers colons ioniens, pour atteindre très rapidement, dès le début du VIe s. av. J.-C, son extension maxima sur la terre ferme, avec la vaste zone d'habitat du "Plateau" occidental. Une grande artère de circulation - la rue (1) de Maria Coja - aurait dès l'origine contourné cet ensemble sur ses flancs sud et ouest, afin d'assurer la desserte directe de la chôra depuis le port méridional. Mais ce n'est qu'au second quart du VIe s. qu'une première enceinte aurait vu le jour2 : montée en briques crues sur un radier de schiste vert et allant de 2.2 m d'épaisseur au sud à 3.3 m sur le front ouest, le plus exposé, elle aurait longé la rue (1) du côté extérieur. Simultanément, on aurait tracé une seconde voie périphérique à l'extérieur du rempart - la rue (2) de M. Coja -, dont le tracé, les dimensions et la technique (coccio pesto) étaient les mêmes que celles de la rue (1), dont elle aurait repris le rôle. Les restes les plus consistants de ce complexe de mur d'enceinte pris entre deux voies de circulation auraient été dégagés du côté sud, dans un ancien sondage demeuré en grande partie inédit et à proximité duquel aurait été découvert également un tronçon de parement appareillé en plaques de calcaire de format carré, encore lié au massif de schiste vert du soubassement, et censé correspondre à un dispositif de "porte à décrochement" (sic). L'existence de ce premier rempart archaïque aurait pris fin dans les dernières années du VIe s., au moment de l'expédition de Darius contre les Scythes, même

RELIGIONS DU PONT-EUXIN, 37-52