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Savoie. Ecologie, économie, art, littérature, langue, histoire, traditions populaires, 1978 (coll. Encyclopédies régionales)

[compte-rendu]

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Savoie. Ecologie, économie, art, littérature, langue, histoire, traditions populaires. Le Puy, Christine Bon-neton Editeur, 1978, 365 p., 131 ill. (coll. Encyclopé¬ dies régionales ).

Cinq auteurs se sont partagé le vaste programme défini par le sous-titre de ce livre. Le péril était grand, vu l'ampleur et la complexité de la tâche, l'état inégal de la documentation et des études dans les divers do¬ maines abordés, mais l'audace était belle : donner de la Savoie une vision aussi complète que possible sous une forme synthétique. Disons tout de suite que la réussite est inégale suivant les secteurs.

Jacques LOVIE, spécialiste bien connu de l'histoi¬ re de la Savoie, a brossé une esquisse du destin original de cette province, divisée d'abord entre plusieurs Etats féodaux composites, puis unifiée peu à peu par la Mai¬ son de Savoie et englobée dans le royaume de Piémont-Sardaigne. De langue et de culture française, entraînée souvent à son corps défendant dans les conflits europé¬ ens, soumise de plus en plus étroitement à la tutelle de l'administration piémontaise, la Savoie a su conserver son identité qui apparaît au premier regard dans l'ar¬ chitecture traditionnelle comme dans l'art populaire.

Cette question a été fort bien traitée par Paul DU-FOURNET, architecte de formation, disciple et ami de Van Gennep, observateur perspicace et collectionneur passionné. Refusant de séparer la décoration de l'objet lui-même, et celui-ci de l'ensemble fonctionnel dans le¬ quel il s'insère, il a judicieusement intitulé son chapi¬ tre : «La civilisation matérielle et les supports de la foi ». Certes, il ne pouvait tout dire, mais il nous a don¬ né une bonne initiation qui apprend à voir ce qui est encore en place sur le terroir ou à comprendre, en le situant dans son contexte, ce que les musées exposent.

Par contre le chapitre «Vie quotidienne et culture populaire », dû à Alain BOUCHARLAT, se révèle plus décevant. On a l'impression d'une visite au pas de gym¬ nastique dans un diorama de la vie traditionnelle : huit lignes sur les foires, vingt sur les veillées qui n'énumè-rent que des généralités. Comment rendre compte en quelques pages du foisonnement des croyances et des pratiques populaires ? Evidemment ces survols écra¬ sent les nuances de temps et de lieux, condamnent aux

généralisations hâtives et aux affirmations téméraires. Ecrire, par exemple, que la population rurale des an¬ nées 1880 était probablement plus illettrée que celle des générations précédentes et que les analphabètes se multiplient après 1860, est un paradoxe qui aurait be¬ soin de solides preuves pour s'étayer.

Quant au patois il est expédié en une douzaine de pages par le chanoine RATEL, excellent connaisseur, il est vrai, de l'idiome de son village natal, Saint-Martin-la-Porte, mais qui n'en sort guère dans le texte qu'il nous propose.

La littérature est mieux traitée avec le brillant ta¬ bleau qu'en dresse le doyen Louis TERREAUX. Signa¬ lons pourtant que le lac d'Annecy, sans être tout à fait absent grâce à André Theuriet, est cependant éclipsé par le Bourget et Léman, au point de faire oublier Eugè¬ ne Sue, Taine et André Gide. Mais là encore on ne pou¬ vait tout dire, et il était sans doute difficile de faire le partage entre les écrivains réellement inspirés par les paysages de Savoie et ceux qui n'ont fait qu'y trouver un asile plus ou moins temporaire. Quoi qu'il en soit, en lisant ce panorama littéraire on ne ressent que plus vivement l'absence de tout développement concernant la littérature orale.

Les études de géographie alpine se sont multi¬ pliées depuis une quarantaine d'années et la partie consacrée au milieu naturel et à l'économie était, avec la partie historique, la mieux défrichée par de grands travaux scientifiques. Il fallait pourtant un maître com¬ me Pierre PRÉAU pour en faire la synthèse et discer¬ ner, pour notre plus grand profit, l'essentiel de l'acces¬ soire.

Bref, malgré ses imperfections, un manque de coordination entre les auteurs qui nous donnent chacun leur point de vue sur la Savoie plutôt qu'une oeuvre pensée et construite en commun, ce livre fait aimer le pays et les hommes qu'il décrit. Il a donc atteint son but. Ajoutons que l'iconographie, abondante et souvent originale, contribue pour sa part à ce résultat.

Roger DEVOS