Couverture fascicule

Intervention française au château d’Hauteville (Suisse)

[compte-rendu]

Année 2018 176-1 pp. 69-70
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69 Chronique sous l’Ancien régime, dirigé par Jörg Ulbert et Sylviane Llinares (2017), on retiendra l’étude soigneuse de Basile Baudez consacrée à la construction du bâtiment du ministère de la Guerre et des Affaires étrangères à Versailles et à l’installation qui s’en suivit des bureaux du secrétariat de la Marine. L’auteur reprend ici en partie une étude parue antérieurement dans un bel ouvrage collectif, destiné à un plus grand public 1. La contribution de 2017 éclaire plus spécifiquement l’installation et les décors des seuls bureaux de la Marine qui n’avaient pas fait l’objet d’une étude particulière dans l’ouvrage de 2010. Cette contribution d’un historien de l’architecture est la bienvenue ; elle occupe une place nécessaire et utile dans un ouvrage consacré presqu’entièrement à l’histoire administrative. En effet, comme le rappelle l’introduction historiographique de l’ouvrage rédigée par Jörg Ulbert, le ministère de la Marine a été fondé en 1669 mais n’est devenu un département propre de la Maison du Roi qu’en 1749. La création de nouveaux bureaux eut pour conséquence d’entraîner une spécialisation croissante des commis affectés à l’administration de cette institution (p. 11). Tout en rappelant sur les grandes étapes de la construction particulièrement rapide du bâtiment dit du «Ministère de la Guerre » (1759-1761), l’auteur revient sur la manière dont les bureaux de la Marine se sont agrégés à cette «cité administrative » , conçue à l’origine pour les ministères de la Guerre et celui des Affaires étrangères. La chronologie du chantier montre «la permanence de l’improvisation dans la prise de décision ministérielles et dans la conduite des projets » (p. 47). Bâtiment conçu pour deux puis trois ministères, il est pour cette raison «le premier édifice pensé et réalisé pour abriter des bureaux et des archives en France » (p. 60). À l’instar de l’ensemble de l’ouvrage, l’étude de Basile Baudez s’attache à montrer le phénomène de rationalisation de l’administration royale, mais cette fois-ci à travers l’architecture, qui passe aussi par la standardisation des espaces conçus, meublés et décorés pour ces administrations. L’auteur revient également sur la carrière du constructeur de l’hôtel, Jean-Baptiste Berthier (1721-1804), ingénieur géographe du roi, notamment connu pour avoir initié le travail de cartographie des côtes des Bretagne ou encore celui des cartes des Chasses du roi. Il sut adapter le programme du bâtiment aux exigences des deux ministres successifs, du maréchal de Belle-Isle puis le duc de Choiseul. Le résultat ne manque pas d’intérêt. D’un point de vue constructif d’une part, puisque Berthier y utilisa, pour la première fois sur un si grand espace, la «voûte Roussillon » ou voûte plate en briques qui contribua à la célébrité du bâtiment. Du point de vue de la programmation, d’autre part, puisque l’hôtel fut conçu d’emblée comme un bâtiment destiné aux services d’une administration. Basile Baudez précise la destination des pièces (bureaux, dépôts d’archives des cartes et plans ou maquettes, imprimerie) et la distribution qui régit l’intérieur. L’étude s’attache à décrire les décors et le mobilier pour mieux faire ressortir l’esprit dans lequel ils furent dessinés, dans une exigence de standardisation au profit d’une administration, ainsi que de stricte hiérarchie entre les administrateurs. L’ouvrage n’étant aucunement illustré, ce qui est vraisemblablement un parti pris éditorial, le lecteur devra se reporter à la monographie de 2010. Cette absence d’illustration prive le lecteur du plan et de la coupe qui lui aurait permis de mieux situer l’emplacement des bureaux de l’administration de la Marine par rapport aux autres administrations ce qui aurait fait gagner le propos en clarté. – Basile Baudez, «Des bureaux pour la Marine : l’hôtel des Affaires étrangères et la Marine à Versailles (1760-1761) » , p. 47-60 dans Jörg Ulbert, Sylviane Llinares dir., La liasse et la plume. Les bureaux du secrétariat d’État de la Marine (1669-1792), Paris, Presses universitaires de Paris-Sorbonne, 2017. Léonore Losserand

1. Basile Baudez, «Un chantier exemplaire » , p. 42-59, dans Basile Baudez, Elisabeth Maisonnier et Emmanuel Pénicaut dir., Les hôtels de la Guerre et des Affaires étrangères à Versailles,

2010, Éditions Nicolas Chaudun, Ministère des Affaires étrangères et Ministère de la Défense.

Intervention française au château d’Hauteville (Suisse). ‒ Cette belle étude nous conduit au canton de Vaud, au dessus de Vevey sur la commune de Saint-Légier-La Chiesaz, en vue et en surplomb du lac Léman. L’auteur, historienne de l’architecture et rédactrice des Monuments d’art et d’histoire de la Suisse, se propose de reconstruire l’histoire architecturale de la demeure à partir de l’investigation minutieuse du fonds familial Grand-d’Hauteville (archives cantonales vaudoises, série PP 410). Ce fonds se révèle quant aux bâtiments, peu riche en devis ou dessins, mais les quittances ou pièces secondaires abondent, d’où se déduit assez bien le cadre chronologique d’ensemble. La demeure résulte de deux campagnes principales. La première revient à Jacques-Philippe d’Herwarth (1706-1764) de famille allemande, huguenote, banquier lui-même et diplomate, qui se fixe à Vevey en s’y mariant en 1727. Il y acquiert la terre et seigneurie d’Hauteville en 1734 et vers la fin de la décennie 1740 réédifie sur ses fondements une demeure préexistante. Cependant des malheurs familiaux survenus en 1750 le conduisent à se désintéresser de la maison et à la vendre à Pierre-Philippe Cannac en 1760. De famille française huguenote, fixée au Refuge à la Révocation, Cannac est banquier lui aussi et concessionnaire des coches du Rhône. C’est à lui que revient le remodelage de la demeure avec François II Franque pour architecte, qui donne son unité définitive à la résidence. Le château se présente aujourd’hui comme formé d’un grand corps central accosté de deux longues ailes enserrant une cour d’honneur au nord. Les appartements regardent à l’opposé, en direction du lac. L’ouvrage d’Herwarth, noyau de l’ensemble, ne concerne que ce corps central, conçu comme une sorte de casino rectangulaire avec vaste salon à l’italienne embrassant comme il se doit deux niveaux. Le morceau vedette lié à cette campagne est le superbe trompe l’oeil d’architecture de ce salon, peint à fresque dans un style baroque d’une exubérance folle et auquel on attache traditionnellement le nom du tessinois Giuseppe-Antonio Petrini auteur de décors (hélas perdus) pour l’hôtel urbain du même Herwarth : mais la manière de ces peintures n’est pas précisément celle à laquelle on reconnaît d’habitude Petrini. Et, d’ailleurs, lui connaît-on d’autres trompe l’oeil d’architecture ? La deuxième étape survient alors avec François II Franque, qui mentionne l’ouvrage, à la date de 1764, dans le catalogue de ses réalisations personnelles : la documentation signale l’architecte dans les lieux en 1763 prenant les mesures du château. C’est ensuite un constructeur local, Daniel Girard de Vevey, qui conduit le chantier. Dans les archives, abondent les mentions de travaux de second oeuvre jusqu’en 1768 (ferronniers, stucateurs, menuisiers etc...) qui fixent sans ambiguïté cette campagne. À Franque, l’on doit en somme l’insertion du casino d’origine, bloc simple, d’aspect plutôt italien, dans un ensemble à ailes d’allure plus nettement française, avec les deux pavillons qui en monumentalisent les extrémités. Il rhabille enfin les façades du corps central avec frontons sur les travées d’axe, garnissant les corniches de balustres et de pots d’ornement. Bref, tous les motifs de convention du château français. Mais le voilà tributaire des contraintes imposées par le bâtiment préexistant, conçu pour la vie à la campagne toute en rez-de-chaussée et donc sans le décorum français de l’étage dit noble : Franque doit donc obéir dans ses extensions à l’élévation d’origine avec son étage bas et trapu, ses fenêtres d’un format presque carré,

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