Couverture fascicule

Edouard J.C., Jamot C. (dir.), L'Auvergne urbaine, mythes et réalités de la ville auvergnate

[compte-rendu]

Année 2002 77-2 p. 116
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VOL 77 2/2002

Compte rendu d'ouvrage

L'Auvergne urbaine, mythes et réalités de la ville auvergnate, EDOUARD J.C., JAMOT С (dir.), 2002, CERAMAC, Presses de l'Université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand, 254 p.

L'idée dominante est affirmée dès le titre, présentée dès le premier paragraphe de l'introduction et développée avec ténacité tout au cours du développement, pour offrir "une image renouvelée de l'Auvergne" : quoiqu'en pensent certains, l'Auvergne est urbaine. Les auteurs entendent clairement tordre le cou à l'idée récurrente et obsolète d'une Auvergne rurale et marginale et démontrer que, sur le plan urbain, elle est une région "des plus banales", "solidement ancrée dans le monde contemporain". Le défi est somme toute mesuré. Il est aisément relevé.

Aisément relevé pour le géographe qui, si ruraliste soit-il, sait bien que toute région, même la plus rurale, possède une armature urbaine, une hiérarchie et un réseau urbain qui assure l'ancrage du milieu local sous toutes ses formes aux différents niveaux des relations socio-économiques et soutient l'ensemble du développement. La démonstration ne vise d'ailleurs pas le géographe mais cherche expressément à persuader les élus et décideurs locaux de regarder autrement leur région. Il y a quelque chose de farouche, voire d'agressif dans cette volonté de démonstration : les Auvergnats ne savent pas le rôle et l'importance du fait et du réseau urbain ; il est urgent qu'ils renouvellent leur réflexion sur leur région et mettent en place de nouvelles pratiques.

C'est donc avec cette volonté pédagogique que les auteurs déroulent leur analyse. Elle part du constat que l'image de la ville auvergnate est fortement négative, à l'extérieur et surtout à l'intérieur de la région, et masque le dynamisme que cette dernière peut receler. S'agit-il d'un simple déficit de communication ? La question se pose d'autant plus que, comme partout en France, la croissance démographique (faible au demeurant) tend à se concentrer dans les villes et surtout dans des ensembles urbains de plus en plus étendus.

Une grande partie du livre est alors consacrée à la signification de cette dynamique urbaine. L'accent est mis principalement sur le secteur tertiaire (services et également tourisme) devenu, ici comme ailleurs, l'activité dominante de la ville. Il est présenté avec sa force mais aussi ses faiblesses et ses déséquilibres qui font que dans les petites villes proches de la stagnation démographique, il manque de puissance, et dans l'agglomération clermontoise, il assure un encadrement incomplet que renforce le poids des forces centrifuges. L'offre en transports est très éclairante des difficultés dont souffre

l'Auvergne urbaine. Clermont-Ferrand tire correctement son épingle du jeu malgré la médiocrité de la voie ferrée et grâce au hub aérien et au développement autoroutier. Les villes du nord aussi, car elles sont plutôt bien reliées à la capitale auvergnate et à Paris ou Lyon. Mais les villes du sud, et particulièrement Aurillac, sont toujours dans une situation d'enclavement qui nuit à l'harmonie du développement urbain auvergnat. Cela pèse réellement sur le réseau urbain, si christallérien soit-il. Il y a bien longtemps que "les villes ne vivent plus en autarcie" (si jamais elles ont ainsi vécu !) et que les relations les animent mutuellement. Or le développement métropolitain de Clermont-Ferrand et le faible dynamisme des villes moyennes sont sources de déséquilibre et, sur ce point, il est certain que les décideurs devraient avoir une politique éclairée et renouvelée. On s'interroge toutefois sur le parti défendu par Jean- Charles Edouard : faut-il vraiment préférer que Clermont-Ferrand soit ville de rang 2 et fasse partie de la couronne parisienne plutôt que d'être une ville de rang 3 qui la mette dans une position, peut- être moins glorieuse mais plus équilibrée, de relations actives avec Lyon?

La dernière partie de l'ouvrage revient précisément sur le rôle de la gouvernance urbaine dans la gestion de l'espace auvergnat et précise un certain nombre de problèmes contemporains qui se posent à travers la vie urbaine régionale. La ville auvergnate souffre d'un déficit d'image, était-il souligné au début de l'ouvrage. Cette idée est reprise à travers la médiocre facture qui caractérise de nombreuses villes, du centre à la périphérie, et qui se poursuit, au- delà des banlieues, par cette coalescence périurbaine qui affecte toutes les agglomérations contemporaines. Il y a là affirmation d'une nécessaire politique de maîtrise de l'espace et de bonne gouvernance urbaine. Or les stratégies urbaines qui visent à "la reconstruction de la ville sur elle-même ou au renouvellement urbain" ne sont pas clairement définies et dominées. Les enjeux intercommunaux ne sont pas non plus précisément analysés et mis en code dans des projets de développement ; les rivalités de territoires pèsent lourd, ici aussi. C'est tout le problème de la cohérence territoriale qui est ainsi posé à travers la ville, problème politique s'il en est et sur lequel les responsables, élus, techniciens, penseurs peuvent être justement et activement interpellés. C'est un problème auvergnat, mais pas uniquement.

Brigitte PROST