ADELINE DAUMARD

NOBLESSE ET ARISTOCRATIE EN FRANCE AU XIXe SIÈCLE

Les nobles ne furent pas tous persécutés en France après la chute de l'ancien régime, mais la noblesse connut une période d'effacement, avant de retrouver considération et influence au XIXe siècle. Les nobles ont pu être raillés, attaqués, haïs même parfois, mais, sauf exceptions, la noblesse, au cours du siècle, a été plus épargnée que la «bourgeoisie» ou les «capitalistes». Qu'est-ce donc qu'un noble dans une nation et à une époque particulièrement attachées au principe de l'égalité juridique entre les citoyens, mais où l'opinion restait sensible aux distinctions liées à la qualification nobiliaire? Individuellement reconnus, les nobles par ailleurs formaient-ils une noblesse? Comment passer des individus au corps? Balzac posa très clairement la question en reprenant par deux fois la formule, «il n'y a plus de noblesse aujourd'hui, il n'y a plus qu'une aristocratie», aristocratie fondée, contrairement à la conception traditionnelle, non sur le sang, mais soit sur l'argent1, soit sur le mérite personnel2. Certains des représentants des plus vieilles familles françaises avaient ressenti très tôt combien il était désormais difficile de définir la noblesse dans la société française. Le duc de La Rochefoucauld- Doudeauville s'éleva, en 1817, contre «la séparation qu'on suppose entre ceux qui sont nobles et ceux qui ne le sont pas. . . moi aussi, ajoutait-il, je vois des nobles partout [sur les bancs de la chambre des députés] : j'y vois partout des hommes d'honneur. Voilà la véritable noblesse»3. Cette définition d'ordre moral n'est pas sans rapport avec la maxime «noblesse oblige» par laquelle le duc de Levis, à son retour de l'émi-