706 Comptes rendus

Donald K. Swearer, Becoming the Buddha: The Ritual of Image Consecration in Thailand, Princeton, Princeton University press, 2004, 336 p. [ISBN 0691114358, $45]

Becoming the Buddha : sous cette invitation, Donald Swearer, spécialiste américain du bouddhisme du Theravada, nous propose toute une étude du rituel de consécration des représentations du Bouddha. Le fait mérite d'être souligné : il s'agit de la première étude de ce genre alors même que les statues du Bouddha font partie des vecteurs de l'histoire du bouddhisme en Asie du Sud-Est tout autant que les moines, les textes et les reliques enchâssées dans les stoupas. C'est que la bouddhologie classique a eu tendance à ignorer le rituel, ainsi que le souligne avec pertinence Hallisey, un des auteurs qui en initiant la réflexion critique sur les études bouddhiques a ouvert la voie à leur refondation '. Cet auteur montre que l'ignorance du rituel fut induite par le biais textualiste, alors même que les premiers textes theravadin donnés aux Occidentaux par leurs informateurs traitaient de rituels d'ordination, et que les sociétés du Theravada se la sont ensuite appropriée, selon un phénomène de mimésis culturelle.

C'est dans ce contexte qu'il faut comprendre ce qu'apporte Becoming the Buddha à la connaissance du culte des images dans le bouddhisme du Theravada. Dans la lignée des études les plus récentes qui cherchent à éviter les biais orientalistes, Swearer traite de ce culte à partir du rituel qui, en l'absence de lien historique entre une représentation et le Bouddha - tel qu'il en existe, par exemple, pour les reliques -, permet cependant d'en faire aussi une incarnation de la présence vivante du Bouddha. En plaçant le rituel au centre de son étude, Swearer montre comment s'opère la transformation qui fait de la statue un objet de dévotion, susceptible de produire du mérite, et qui plus est, il se donne les moyens de dépasser les controverses suscitées par le paradoxe d'un culte theravadin des images en dépit du dogme de l'absence du Bouddha. Ces controverses font partie de l'histoire de la pensée bouddhique comme des études bouddhiques et ainsi que l'a montré Schopen, elles s'appuient sur des modèles interprétatifs à deux niveaux, soit qu'ils distinguent les pratiques des religieux à la recherche du salut de celles des laïcs, au contraire inscrites dans le monde, soit qu'ils isolent une phase aniconique du bouddhisme indien et ses développements mahâyanistes. Swearer, quant à lui, substitue à ces modèles une approche pragmatique qui interroge le sens de la présence réelle du Bouddha dans un contexte particulier.

En effet, l'autre parti pris de cette étude est de s'enraciner dans l'observation d'une pratique localisée, celle observée dans le nord de la Thaïlande contemporaine. Sous cet angle, cet ouvrage est d'abord l'analyse des différents aspects de la construction des statues de Bouddha et de la cérémonie par laquelle elles sont consacrées dans cette région. La première partie présente ainsi, outre la question du culte des images dans le bouddhisme, celle de son contexte dans cette région. L'image dans son hall (wihân) est replacée en tant qu'élément central des activités dévotionnelles et rituelles des pratiquants et dans sa relation symbiotique au stoupa-