Les innovations techniques dans la fabrication de la céramique médiévale et moderne dans le nord-est de la France
Yves HENIGFELD
Archéologue INRAP (Institut national de Recherches archéologiques préventives)
Envisagée dans une perspective historique, l''étude des vestiges archéologiques offre non seulement des renseignements d''ordres socio-économiques et culturels, mais également des informations sur les innovations techniques. Cette question, récurrente dans l''histoire de la recherche, a fait l''objet de publications récentes dans lesquelles la céramique médiévale occupe une place à part entière1. Parmi celles-ci, plusieurs articles de synthèse abordent la question sous l''angle particulier de l''apparition de la glaçure et du grès, qui sont considérés comme des innovations majeures dans l''histoire des techniques de fabrication2. Ces travaux reposent, pour l''essentiel, sur un corpus documentaire provenant de sites localisés dans l''ouest et dans le sud de la France. Si l''on compare ces données au mobilier alsacien et lorrain, il est possible de dégager certaines caractéristiques communes, mais aussi de relever des particularités régionales. Dans le nord-est de la France, la question des innovations techniques dans la fabrication des poteries médiévales et modernes n''a jamais été traitée en tant que telle. Or les développements récents de l''archéologie préventive en Alsace et en Lorraine offrent aujourd''hui la possibilité d''envisager la question à une échelle interrégionale. L''étude porte sur le mobilier issu d''une sélection de sites de production et de consommation susceptibles de faire l''objet d''une exploitation fiable. Il s''agit en l''occurrence de céramiques provenant des sites urbains de Metz (Moselle), d''Épinal (Vosges), de Mulhouse (Haut-Rhin), de Strasbourg (Bas-Rhin) et du site rural de Grosbliederstroff (Moselle), près de Sarreguemines. Le cadre chronologique de l''étude s''étend de la fin du
Xe au début du XVIIe siècle. Il est volontairement envisagé sur période suffisamment longue pour permettre la caractérisation des principaux changements qui ponctuent l''histoire de la poterie3. Parmi eux, c''est sans doute le développement des techniques de montage, de revêtement et de cuisson qu''il convient de présenter et de tenter d''interpréter dans une perspective historique.
1. Voir en particulier P. Beck, dir., L’innovation technique au Moyen Âge ; P. Lardin et G. Bührer-Thierry, dir.,
Techniques : les paris de l''innovation.
2. C. Hanusse et al., L’apparition des glaçures plombifères et stannifères : exemples français ; A.-M. Flambard-Héricher, grès médiévaux : évolution ou révolution ? ; A.-M. Flambard-Héricher, La production du grès : une affaire de goût. 3. Les terres cuites architecturales, les céramiques de poêle et les céramiques d''éclairage n''ont pas été prises en considération dans la mesure où leur étude aurait nécessité une approche spécifique. Parmi les publications portant sur les innovations techniques dans le domaine de la céramique de poêle, se référer, entre autres, à J. Maire et J.-J. Schwien, La cheminée et le poêle, ou l’art de se chauffer en Alsace au Moyen Âge.
