INTRODUCTION

Nous avons évité dans ce recueil toute intervention critique et simplement voulu contribuer à ce que des linguistes français, et plus particulièrement des non-germanistes, puissent reconnaître ce qui peut les intéresser dans les travaux de grammaire generative conçus dans les pays dont la langue ou l'une des langues est l'allemand. L'examen de la bibliographie permettra de constater que seuls les chercheurs de la République Démocratique Allemande, de la République Fédérale Allemande et de Berlin ont eu jusqu'à ce jour dans ce domaine une production assez abondante pour qu'on veuille l'examiner dans son ensemble. Nous pensons qu'il est possible d'inscrire les travaux de ces divers chercheurs dans une seule et même présentation schématique : ils confrontent leurs points de vue scientifiques et ils ont du développement des études linguistiques dans le monde la même connaissance. Cette cohérence est peut-être également due au fait qu'il existe depuis dix ans en RDA un centre de recherche « Arbeitsstelle Strukturelle Grammatik » (ASG), travaillant exclusivement dans le cadre de la grammaire generative, dont la progression est suivie avec intérêt par tous les linguistes allemands (cf. p. 7 : « L'ASG : bilan de dix années de recherche »).

L'ampleur assez considérable d'une production qui a commencé quatre ans après la parution en 1957 des «Syntactic Structures » de Chomsky et qui n'a cessé de croître nous semble justifier qu'on consacre un recueil entier aux travaux liés à la grammaire generative et qu'on les isole ainsi des études qui se réfèrent à d'autres théories. Nous devons d'ailleurs signaler qu'en 1957 les théories et méthodes structuralistes, qu'elles soient américaines ou européennes, n'avaient que fort peu pénétré dans les deux Allemagnes. Il n'y a pas place ici pour une explication de ce phénomène, qui devrait faire intervenir de nombreux paramètres : il serait insuffisant de dire par exemple que les chaînes signifiantes de l'allemand se seraient mal prêtées à la segmentation ou à la reconnaissance de classes d'équivalence positionnelle.

Les articles contenus dans ce recueil doivent permettre d'apercevoir ce que fut l'évolution théorique de la grammaire generative en pays de langue allemande et de prendre connaissance des problèmes qu'elle pose actuellement. Les travaux dont il est rendu compte dans l'exposé « L'ASG : Bilan de dix années de recherche » (cf. p. 7) sont largement représentatifs de cette évolution : point de départ que peut symboliser « Syntactic Structures »; passage, grâce à l'expérimentation et à une information régulièrement reçue des États-Unis, à un second modèle chomskyen que peut symboliser « Aspects of the theory of syntax »; puis critique d'« Aspects ».

Dans cette critique ď « Aspects », l'ASG traite de certains points comme l'élargissement du domaine de la sous-catégorisation, qui semblent pouvoir être sans difficultés intégrés dans le modèle « Aspects », mais aborde aussi des thèmes tels que la co-référence, la présupposition ou la place de la sémantique dans la grammaire, qui sont plus de nature à entraîner une révision importante de l'appareil formel. On verra grâce à la bibliographie (p. 124 sqq., sous A3 et A6), que cette réflexion est commune à un grand nombre de chercheurs allemands. Il faut noter toutefois qu'elle