Couverture fascicule

Iliana Kasarska (dir.), Mise en oeuvre des portails gothiques. Architecture et sculpture

[compte-rendu]

Année 2012 170-1 pp. 84-86
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les courants alors en vogue dans les pays de la Loire et en ile-de-France. La marche vers le gothique est lancée. Ce beau livre a reçu le Prix SFA 2010 de la publication, sera très utile. Bien structuré, agréable à manipuler, il est écrit avec clarté, fluidité, vivacité et chaleur. En outre, la qualité exceptionnelle des superbes et très nombreuses photographies, légendées avec soin, de J.-Fr. Amelot – déjà très apprécié pour l’illustration de

La sculpture romane en Bas Limousin d’Évelyne Proust (2004, c. r. Bull. mon., 2006-4, p. 88) -subliment la démonstration. Elles révèlent les détails des sculptures souvent inaccessibles. Réjouissons-nous donc qu’une réimpression de ce magnifique ouvrage soit déjà en cours. Laurence Cabrero-Ravel Université de Pau

iliana kaSarSka (dir.), Mise en oeuvre des portails gothiques. Architecture et sculpture.

actes du colloque tenu au musée de Picardie, amiens, le 19 janvier 2009, Paris, Picard, 2011, 28 cm, 158 p., 49 fig. et pl. en n. et bl. et en coul., schémas, plans. -iSBn : 978-2-7084-0891-3, 34 €.

Pour l’histoire de la sculpture monumentale gothique, l’archéologie du bâti, la

Bauarchäologie telle que Manfred Schuler l’avait appliquée au portail des Princes de la cathédrale de Bamberg fut comme un coup de tonnerre (Das Fürstenportal des Bamberger Domes,

Bamberg, 1993). Précédemment, l’analyse archéologique du portail principal de Notre-Dame de Paris par Jean Taralon (Bull. mon.,

t. 149, 1991, p. 342-352) avait suscité un même émoi, il est vrai avec des moyens plus réduits, mais appliquée à un monument encore plus emblématique. Les Actes du colloque d’Amiens édités par i. Kasarska ont étendu à d’autres monuments cette même problématique résumée sobrement en son sous-titre : Mise en oeuvre des portails gothiques.

Même si le but poursuivi est identique, les moyens mis en oeuvre par les huit intervenants sont bien différents. Ainsi, Patrick Ponsot et Jerry Sampson pour leurs études des façades occidentales des cathédrales de Bourges, de Wells et de Salisbury, disposaient d’une équipe de techniciens et d’ingénieurs chevronnés, à l’inverse de Christine Hediger ou de Dany Sandron qui ont dû se contenter de simplesmensurations

in situ, il est vrai à partir d’échafaudages, et des renseignements que leur ont communiqués les restaurateurs. Les moyens n’étant pas les mêmes, les résultats des uns et des autres sont évidemment différents, mais tous du plus grand intérêt, car ensemble ils projettent un regard neuf sur des monuments pour la plupart de première importance ou pour bonne part inédits. La contribution de Dany Sandron : «Les rois s’invitent à Notre-Dame » , p. 11-28, est de ce point de vue exemplaire. À ce titre, elle méritait de figurer en tête du recueil. À partir d’observations touchant à de menus détails, l’auteur est amené à imposer l’idée du remaniement de l’étage inférieur de la façade occidentale de Notre-Dame de Paris, remaniement rendu nécessaire afin d’aménager une estrade pour la célèbre galerie des rois, galerie qu’il faut bien qualifier de repentir, d’adjonction, ô combien solennelle, au programme sculpté primitif. L’addition de cette galerie en frise continue pourrait donc être la conséquence d’un changement de parti, initié peut-être sous l’épiscopat d’Eudes de Sully (1197-1208) et mis en oeuvre sous celui de Guillaume de Seignelay (1219-1224). La problématique de l’alignement de 28 figures royales, asymétrique (1+ 8+ 1+ 9+ 1+ 7+ 1), est donc à revoir sur la base de cette nouvelle approche archéologique. À cette occasion, peutêtre devrait-on introduire dans la discussion une autre suite royale, celle des couronnements répétitifs des princes d’israël au bas de la verrière des Nombres de la vitrerie de la Sainte-Chapelle de Paris. il me paraît en effet nécessaire de confronter la signification de ces deux suites royales, celle de la cathédrale et celle de la chapelle royale. i. Kasarska a analysé avec un soinminutieux le portail Saint-Honoré de Notre-Dame d’Amiens et la fenêtre haute, à l’étage de la rose, de la façade ouest de Notre-Dame de Laon («Construire un décor sculpté : le portail de la Vierge dorée (Amiens) et la fenêtre des Arts (Laon) » , p. 29-46). L’observation attentive de menues retouches l’a poussée à conclure que si un plan précis précéda et détermina l’exécution sous la loge de chaque élément sculpté, des modifications ont pu intervenir au moment du montage, sans qu’on ait modifié pour autant le programme primitif, même si on s’est vu forcé d’adapter des éléments préparés d’avance à un nouveau cadre architectural. C’est beaucoup plus sensible à Laon, et surtout plus visible. ici comme souvent ailleurs, il a été nécessaire de couper l’extrémité de certaines calottes crâniennes ou d’araser, de réduire des éléments déjà sculptés, ou alors d’insérer des «tapées » (c’està-dire des rajouts) entre les voussures et leur encadrement architectural. Reste que pour la mise en place du portail Saint-Honoré, un processus préalable précis a été défini. Après l’élévation des soubassements, des ébrasements et des piédroits solidaires de la structure murale adjacente ont été montés en parallèle puis, successivement, le trumeau et le linteau structurel – lequel se situe dans le prolongement de la partie supérieure de l’ébrasement –, puis les voussures de l’extérieur vers l’intérieur, et après seulement les différentes parties du tympan constituées de figures en ronde-bosse, les apôtres du registre inférieur, ou de dalles sculptées en haut relief plaquées contre une cloison murale. Les «défauts » relevés par l’auteur sont ici véniels, à l’inverse de ce que l’on observe au portail central de la façade occidentale où les statues en rondebosse du Christ, de saint Jean, de la Vierge et des anges présentant les instruments de la Passion ont été alignés cahin-caha en zig-zag avec au besoin de grands coups de marteau là où une saillie gênait. Les portails occidentaux disparus de l’abbatiale de Charroux, comme ceux deMarmoutiers, nous sont connus par des dessins ou des gravures, et pour Charroux par une importante série de sculptures déposées dont Chiara Piccinini, Diane Joy et Laurent Prysmicki ont entrepris l’étude à nouveaux frais, de nature archéologique. Pour autant qu’on en puisse juger par la documentation subsistante, les statues d’ébrasement avaient déjà disparu avant la destruction des portails mais présentaient une disposition qui dérive de celle des portails occidentaux de Saint-Etienne de Bourges où ces statues ne se situent pas dans le prolongement des voussures. C’est très net à Marmoutiers. On pensait jusqu’ici qu’à Charroux seul le portail central était historié et doté d’un tympan. Parmi les découvertes signalées dans cette précieuse contribution, on retiendra pourtant celle d’un fragment de dalle sculptée représentant une dormition de la Vierge et son Assomption, cette dernière sous la forme probable de deux anges élevant dans une mandorle non l’âme de Marie mais plutôt son corps, de taille adulte, une particularité qui nous renvoie au portail de la Vierge de Saint-Etienne de Bourges. Cette petite pierre reste un apport majeur à une meilleure connaissance de la sculpture de Charroux, et par ricochet au gothique méridional qui dans le sillage de Bourges et de Tours a rayonné dans toute l’Aquitaine et par-delà la Gascogne dans le nord de l’Espagne. C’est à une façade disparue, ô combien palimpseste, si on en juge par la copie du dessin qui en fut levé avant 1587, que s’est intéressée Enrica Neri Lusanna («Des vestiges au projet d’Arnolfo : réflexions autour des portails perdus de la cathédrale de Florence » , p. 65-78), façade qui fut l’objet d’une exposition spectaculaire en 2005. L’auteur apporte ici des précisions nouvelles sur le sens de ces trois portails, tous dédiés à la Vierge, sur leurs reliefs monumentaux et leur encadrement décoratif, parfois constitué de mosaïques. On en retiendra surtout une proposition qui, bien qu’hypothétique, n’en demeure pas moins plausible et importante : celle de restituer au-dessus de la porte principale, avec la Vierge trônant entre les deux saints florentins sainte Reparata et saint Zanobi, le groupe du pape Boniface Viii, trônant en majesté entre deux dignitaires ecclésiastiques. Le pape, en figure de l’Eglise terrestre, serait ainsi associé à Marie, en figure de l’Eglise céleste. 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