Couverture fascicule

Симона Ландау, Мост в тумане : семейная хроника XX века, Фрагменты из книги воспоминаний, 2003 [Simone Landau, Un pont dans le brouillard : chronique d'une famille du XXe siècle, Tambov, 2003]

[compte-rendu]

Année 2008 30 pp. 120-121
Fait partie d'un numéro thématique : L’intelligentsia en Russie
doc-ctrl/global/pdfdoc-ctrl/global/pdf
doc-ctrl/global/textdoc-ctrl/global/textdoc-ctrl/global/imagedoc-ctrl/global/imagedoc-ctrl/global/zoom-indoc-ctrl/global/zoom-indoc-ctrl/global/zoom-outdoc-ctrl/global/zoom-outdoc-ctrl/global/bookmarkdoc-ctrl/global/bookmarkdoc-ctrl/global/resetdoc-ctrl/global/reset
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
Page 120

120

NOUS AVONS LU

Mémoires

Симона ЛАНДАУ, Мост в тумане : семейная хроника XX века, Фрафменты из книги воспоминаний, Тамбов, Изд-ство ОГУП, 2003, 415 стр. [Simone LANDAU, Un pont dans le brouillard : chronique d'une famille du XXe siècle, Tambov, 2003].

Le 16 mai 1903 était inauguré en grande pompe, dans le cadre du bicentenaire de la fondation de Saint-Pétersbourg, le pont de la Trinité [Троицкий мост], dont le président Félix Faure avait posé six ans plus tôt la première pierre. Le 15 décembre 1934, il était rebaptisé « pont Kirov », du nom du dirigeant communiste assassiné deux semaines plus tôt dans sa ville de Leningrad. Avec ce changement de nom disparaissait un pan de la mémoire de l'ancienne capitale : la nouvelle plaque ne mentionnait plus ni l'entreprise française qui avait assuré la construction du pont, ni son représentant en Russie, l'ingénieur Jean- Jacques Landau, responsable de la réalisation du projet.

Petite-fille d'Ivan Avgoustovitch Landau, comme on l'appelait dans son pays d'adoption, l'auteur de cette « chronique familiale du xxe siècle » a lutté pendant plusieurs décennies pour réhabiliter la mémoire de son grand-père, mort à Varsovie en 1929, et celle de son père Gustave Landau, ingénieur des Ponts et Chaussées formé à Saint-Pétersbourg, arrêté à Viazma en avril 1937 et exécuté le 2 janvier 1938. Mêlant souvenirs d'enfance et de jeunesse, récit de sa quête de la vérité, documents d'archives et poèmes personnels, son livre, dont des extraits sont parus dans la revue Zvezda dans la rubrique « Mémoires du XXe siècle »', est de ceux qui, à partir d'un lieu où s'enracine une lignée, donnent à voir la grande histoire à travers le prisme de l'histoire familiale. À ce titre, il peut rappeler l'ouvrage de Serge Schmemann Echos d 'une terre natale 2, qui associe quête des racines, chronique familiale et histoire de la Russie reflétée dans le microcosme d'un village de la région de Kalouga, avec cette différence que le lieu n'est pas ici un « nid de gentilshommes», mais un ouvrage d'art, vestige de l'alliance franco-russe et produit emblématique du savoir-faire et des valeurs

d'une intelligentsia pétersbourgeoise nourrie d'apports étrangers.

Comme le pont Alexandre III, dont la première pierre avait été posée par Nicolas II lors de son voyage à Paris en 1 896 et qui fut inauguré en 1900 à l'occasion de l'Exposition universelle, le pont de la Trinité à Saint-Pétersbourg est l'œuvre de la Société des Batignolles, alors spécialisée dans la construction de lignes de chemins de fer et de ponts métalliques. C'est ainsi que l'ingénieur français Jean- Jacques Landau, originaire de Pologne, est envoyé en 1 894 à Saint-Pétersbourg pour diriger le projet. En 1899, il s'y installe définitivement avec son épouse bretonne et leurs trois enfants, rejoignant les rangs des ingénieurs, architectes et artistes d'origine occidentale qui contribuèrent à l'essor et à la renommée de la capitale de Pierre le Grand. Ainsi s'entrecroisent, dans le premier chapitre du livre de Simone Landau, l'histoire familiale et, documents à l'appui, l'histoire du pont, depuis le concours international lancé en 1 892 par la municipalité de Saint-Pétersbourg jusqu'à son inauguration solennelle en présence de la famille impériale.

Après l'achèvement du pont de la Trinité, le citoyen français Ivan Landau et sa famille restent en Russie, bien que le projet de la Société des Batignolles n'ait pas été retenu pour le pont du Palais. Il y reste aussi après la révolution. En 1921, il est arrêté et détenu six mois à la prison de la rue Chpalernaïa, en même temps que l'architecte Léonti Benois, frère du peintre Alexandre Benois, que l'académicien Vernadski et bien d'autres. Une fois libéré, il se laisse persuader par son épouse de retourner en France. Toute la famille finit par obtenir des visas. Mais en 1923, ils ne partira qu'avec ses deux filles : entre temps, son épouse est morte et son fils Gustave, le père de l'auteur, a décidé de

LA REVUE RUSSE 30, Paris, 2008.

doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw