Dominique KASSAB et Numan TUNA

RAPPORT PRÉLIMINAIRE DE LA PROSPECTION ARCHÉOLOGIQUE

D'ATELIERS DE CÉRAMIQUE DANS LA RÉGION DE TEKÎR/YAZI KÔY A ÎMAMINBURNU

(6 - 20 août 1986)

L'antique Cnide est célèbre par sa cité, ses deux ports et ses sanctuaires. Sa prospérité due à son commerce largement développé est bien connue et lui confère une des premières places parmi les cités antiques de l'Anatolie.

Mais, jusqu'à présent, un facteur essentiel de la vie cnidienne, était demeuré dans l'ombre: sa production céramique. Des ateliers céramiques sur la route de Yazi Kôy - Tekir ont fait l'objet de prospections et de sondages pour la première fois en 1967, lors des fouilles menées par I. C Love1. Ces ateliers ont été ensuite plus précisément étudiés par N. Tuna en 1983 pendant des prospections dans la péninsule cnidienne2. Le matériel d'Anatolie occidentale, encore très peu étudié, a attiré l'attention des spécialistes, en particulier de ceux qui travaillaient sur les céramiques hellénistiques, et il est apparu nécessaire d'établir un projet d'étude plus vaste sur les ateliers céramiques de cette région.

Des quatre ateliers connus dans la région de Tekir, deux ont été prospectés systématiquement dans le cadre d'une collaboration franco-turque. L'équipe dont Numan Tuna assurait la direction était la même que celle de la prospection de Re§adiye-Kiliseyani qui avait eu lieu précédemment (cf. pp. 47-52): ces deux prospections sont évidemment complémentaires et s'éclairent l'une l'autre.

Le travail a été réparti de la façon suivante: le site et l'implantation des ateliers dans la péninsule de Datça seront étudiés par Numan Tuna, la céramique fine et commune par Dominique Kassab, les amphores par Jean- Yves Empereur, En outre, Maurice Picon étudiera la géologie du site et Numan Tuna informatisera l'inventaire du matériel.

Une telle recherche constitue une nouveauté, puisque seuls les ateliers de Kestel, près de Pergame, avaient été découverts jusqu'à présent en Anatolie, pourtant si riche en céramiques.

Pourquoi avoir choisi de faire une prospection plutôt qu'une fouille? Notre option est due à un souci d'efficacité. Cette prospection constitue en fait une étape préparatoire à l'établissement d'une fouille. En effet, plutôt que de détruire définitivement un terrain par des sondages multiples et inutiles, nous avons préféré

dre tout d'abord le site et connaître le matériel. Seule une prospection le permettait, accompagnée du tracé d'une carte topographique et d'un ramassage de tessons à l'intérieur d'un quadrillage matérialisé au sol. A l'issue de ce travail, nous avons pu poser une problématique, décider quel point fouiller et quelle méthode employer, en accord avec les buts envisagés.

La région d'Imammburnu se trouve à trois kilomètres de Tekir. L'un des deux ateliers (dénommé a2) se situe sur le haut des pentes est et ouest d'un promontoire dont le sommet forme un plateau. Le second atelier (al) est au pied du promontoire suivant, près d'une petite cascade tarie (Fig. 1 et 2). Au-delà de cet atelier, à l'Ouest, se dresse une série de téménos. La carte topographique embrasse les deux sites depuis les terrasses qui surmontent la pente nord-est de l'atelier a2 jusqu'à la zone des téménos de l'atelier al.

Le fait que nous soyons sur des sites d'ateliers est irréfutable: débris de fours, surcuits inutilisables pour la vente (Fig. 3), moules de bols mégariens (Fig. 8).

Dans l'atelier a2, une étude statistique des tessons a été prévue; une carte sera établie par ordinateur montrant la répartition des éléments de fours et des tessons, afin de tirer des informations concernant l'emplacement des fours et leur production à diverses époques. A cette fin, le matériel a été récolté à l'intérieur d'un quadrillage (5x5 m) construit selon les mêmes principes qu'à Re- §adiye (cf. p. 51) (Fig. 4). Ce quadrillage a été limité aux zones ne présentant pas de perturoations et se situant avant les ruptures de pente du promontoire au- delà desquelles des éboulis se sont produits. L'atelier al a été fortement bouleversé et une étude statistique s'avérait impossible.

Les principes de base du ramassage étaient les suivants: pour les amphores étaient conservés les lèvres, les hauts d'anses (timbrées ou non), les bas d'anses, les pieds. Pour la céramique commune et fine étaient ramassés en outre les milieux d'anses et les fragments de parois présentant un décor (en particulier celles des bols mégariens) ou bien une carène ou autre articulation révélatrice de la forme. Tous les moules de bols mégariens ont aussi été pris.

Puisque des statistiques s'avéraient impossibles dans