Couverture fascicule

Jacques Moulin, Les jardins de Vaux-le-Vicomte : histoire, légendes et métamorphoses d’un chef-d’oeuvre d’André Le Nôtre, Paris, Éditions Spiralinthe, 2014

[compte-rendu]

Année 2016 174-2 pp. 227-228
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227 Bibliographie redites. Puis Didier Poncet livre une analyse géologique très approfondie et très instructive sur les matériaux de construction du château (p. 270-275), dont on retiendra que l’ensemble des matériaux (granite, arkose, calcaires grenus) ont une provenance locale. Pour clore le chapitre, G. Vouhé consacre trois pages (p. 275-276) sur le château au xviiie siècle, d’où il ressort que l’édifice a bénéficié de travaux d’entretien importants en 1715, mais également dans les années 1770, avant son acquisition en 1776 par le comte d’Artois. Dès lors, son délabrement ne cessa de s’accélérer et les propriétaires successifs, après la vente du domaine comme bien national, n’entravèrent en rien cette décadence, comme l’explique Alain Marteau dans un article sur le devenir post-révolutionnaire du château, utilisé comme carrière de pierre. Au-delà de l’intérêt des études sur le château proprement dit, qui permettent entre autres de restituer le grand dessein de Charles II de La Porte pour La Meilleraye, l’ouvrage embrasse l’ensemble du mécénat artistique de cette importante famille poitevine à travers leurs collections, avec notamment un riche article de Maria Cavaillès. Par ailleurs, Patrick Michel évoque le destin «tragique » de la collection du cardinal de Mazarin, tombée entre les mains d’Armand-Charles de La Porte : tant par bigoterie que par désir de rompre avec l’héritage des Mazarin, qu’il considérait indévots et libertins, ce dernier mutila nombre de marbres et de toiles. La magnifique collection cardinalice sera dispersée pour satisfaire les créanciers du duc et de sa femme. En réunissant une vingtaine de chercheurs, les coordinateurs de cet ouvrage ont rempli un double objectif, à savoir faire sortir le château de La Meilleraye – et les richesses qu’il abritait – du lent oubli où il était tombé et réunir l’indispensable ferment à de futures études. Julien Noblet

Jardins

Jacques Moulin, Les jardins de Vaux-le-Vicomte : histoire, légendes et métamorphoses d’un chef-d’oeuvre d’André Le Nôtre, Paris, Éditions Spiralinthe, 2014, 30 cm, 127 p., 1123 fig., cartes, index général. -ISBN : 978-291-3440289, 58 €.

Le 400e anniversaire de la naissance d’André Le Nôtre, célébré en 2013, a été l’occasion de nombreuses publications sur l’artiste et son oeuvre. L’ouvrage de J. Moulin s’inscrit évidemment dans ce courant, mais ses racines sont plus anciennes : elles datent des recherches réalisées entre 1992 et 1995 par l’auteur alors qu’il était en charge de Vauxle-Vicomte comme architecte en chef des monuments historiques. J. Moulin propose ici de soumettre les célèbres jardins à une lecture historiographique et, partant, à une critique d’authenticité comme toute oeuvre d’art. Il présente une nouvelle chronologie faisant démarrer les travaux en 1652, soit 4 ans avant la date officielle, en s’appuyant sur la dédicace qu’adresse Charles de Sercy à Fouquet en introduction du Théâtre des plans et jardinages de Claude Mollet publié en 1652, et d’une gravure d’Adam Pérelle datée de 1653. Plusieurs actes de décès de terrassiers dressés en 1653-1654 viennent confirmer l’antériorité des travaux des jardins sur ceux du château. L’auteur aborde très rapidement la question de l’acquisition des terrains. Après avoir cursivement envisagé l’hypothèse qu’André Le Nôtre pourrait ne pas être le créateur des jardins de Vaux, J. Moulin se range à l’attribution la plus courante mais l’enrichit d’observations qui prouveraient une forte influence des peintures de paysage de Poussin, notamment du «Moïse sauvé des eaux » pour créer les Pyramides et le pont sur l’Anqueil ; l’hypothèse est séduisante mais on aimerait la voir étayée d’un argumentaire plus serré. Ses principales sources figurées sont un plan d’Israël Silvestre gravé après 1656 qu’il confronte au plan d’arpentage de Pinon (entre 1656 et 1658) conservé dans les archives privées de Vaux, un dessin préparatoire à une autre gravure de Silvestre (1658), un plan (entre 1658 et 1661) conservé à l’Institut ainsi qu’une série de gravures de Pérelle. Pour décrire minutieusement ces jardins, il s’appuie sur les textes de Madeleine de Scudéry, La Fontaine, Boisrobert et Pélisson. La période de la mise sous séquestre (1661-1669) et les suivantes sont abordées de manière un peu plus factuelle. On y apprend que les jardins sont toujours entretenus par les employés de Fouquet restés sur place, et que son fils Louis-Nicolas vend une partie du domaine mais termine les travaux du parc selon les dispositions prévues par Le Nôtre. La période durant laquelle le Maréchal de Villars en fut le propriétaire (1705-1764) fait l’objet d’une analyse plus conséquente grâce aux plans de la Seigneurie de Villars dressés par des géomètres en 1740 et en 1754. En 1764 le domaine fut acquis par César de Choiseul-Praslin qui conserva le jardin régulier dans ses grandes lignes mais aménagea une «promenade à l’anglaise » le long du ru de Bobée vers 1785. La Révolution épargna Vaux, et Charles de Choiseul-Praslin fit modifier les jardins en 1817 et 1826 ; les parterres et les terrasses près du château furent remblayés au profit d’une pelouse vallonnée et d’autres transformations à la mode. Il est dommage que cette période soit abordée brièvement, alors que comme pour nombre de grands parcs classiques, le passage au «jardin anglais » est souvent une phase d’intense création, révélatrice du goût d’une époque. Théobald de Choiseul-Praslin fit rétablir les parterres réguliers sous la Monarchie de Juillet (avant 1847), le réseau hydraulique fut remis en état et une importante statuaire installée avant un nouvel abandon vers 1870. En 1875, le domaine fut acheté par Alfred Sommier qui s’intéressa à son histoire et aurait voulu faire oeuvre de reconstitution historique pour revenir au jardin d’avant 1847. Il commanda à R. Pfnor une monographie du domaine publiée en 1888 et préfacée par Anatole France, que J. Moulin tient pour une des forces majeures de la réinvention de Vaux. Hippolyte Destailleur dirigea le chantier du canal ainsi que des jardins entre 1877 et 1893, assisté du paysagiste Lainé. Henri Duchêne intervint de 1895 à 1901, son fils Achille entra en scène dès 1908 à la demande d’Edme Sommier. Une importante campagne de travaux fut réalisée entre 1913 et 1923 et le grand parterre de broderies terminé en 1920. J. Moulin eut l’occasion, très rare, d’avoir accès au fond Duchêne, et donc d’en analyser les pièces. Il en tire des réflexions importantes, en particulier qu’Achille Duchêne fut très influencé par les gravures du xviie siècle ; il note néanmoins que les cinq parterres réalisés par le célèbre jardinier doivent beaucoup au style propre aux années 20, proche des créations de Paul Véra ou de Jean-Charles Moreux. Aujourd’hui, personne ne croit plus que les jardins de Vaux soient l’oeuvre du seul André Le Nôtre, alors que les études récentes ont montré que la création précieuse et savante de Le Nôtre avait déjà partout disparu en 1730, et que la composition est très éloignée de celle d’origine. J. Moulin le montre, Achille Duchêne a réalisé une très grande oeuvre originale à Vaux plutôt qu’une restauration ou une reconstitution historique, et ce jardin est le palimpseste de 15 générations. Cette démonstration très argumentée constitue la principale qualité de cet ouvrage, par ailleurs très classique dans sa présentation ; la bibliographie n’est pas très récente

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