Couverture fascicule

Patrick de Laubier, L’eschatologie, (Que sais-je ? 3352), Paris : PUF, 1998

[compte-rendu]

Année 1999 74-1 pp. 121-122
doc-ctrl/global/pdfdoc-ctrl/global/pdf
doc-ctrl/global/textdoc-ctrl/global/textdoc-ctrl/global/imagedoc-ctrl/global/imagedoc-ctrl/global/zoom-indoc-ctrl/global/zoom-indoc-ctrl/global/zoom-outdoc-ctrl/global/zoom-outdoc-ctrl/global/bookmarkdoc-ctrl/global/bookmarkdoc-ctrl/global/resetdoc-ctrl/global/reset
doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw
Page 121

1999/1

PARMI LES LIVRES

Patrick de Laubier, L’eschatologie, (Que sais-je ? 3352), Paris : PUF, 1998. 18 cm. 125 p. ISBN 2-13-048998-2.

C’est peut-être un signe que ce petit ouvrage, dans cette collection-là, sur l’eschatologie. Sinon un «signe des temps », au sens biblique et dans le logos, justement, des écrits apocalyp¬ tiques, du moins l’indice que l’idée théologique d’eschatologie est passée à l’état d’un concept, d’étoffe philoso¬ phique, qui subsume en lui différentes manifestations ou expressions, non seulement religieuses, mais laïques, profanes, d’une mentalité eschatolo-gique qui Traverse l’histoire des civili¬ sations et r.’épargne pas la modernité.

L’a., Pr à l’Université de Genève, montre d’abord en historien qu’un dis¬ cours eschatologique, annonçant la fin du monde et assurant en connaître le déroulement, est commun aux trois religions monothéistes, le judaïsme, le christianisme et l’islam ; qu’un tel dis¬ cours est pour ainsi dire inévitable, «logique », dès lors que s’impose aux esprits une conception linéaire et non plus cyclique (comme chez les pen¬ seurs de l’Inde et aussi dans la philoso¬ phie grecque, platonisme et stoïcisme) du temps ou de l’histoire. Les religions révélant l’origine du monde et la nais¬ sance des nations, en particulier la naissance ou la fondation du peuple élu, l’établissement du pacte entre lui et le Dieu unique, elles doivent bien également en révéler la fin, la destina¬ tion, et remplir le cœur d’espérance. La dramaturgie, c-à-d l’enchaînement des péripéties, et les acteurs -messies, pro¬ phètes, peuples -varient bien sûr avec les époques et les cultures, les «lan¬ gages » ou les idéologies, avec les dif¬ férents «matériaux de représentation », mais le mojvement en avant, à travers toutes sortes de tribulations, et la gloire finale promise sont semblables. C’en sera fini de ce monde-ci, qui est mau¬ vais, et adviendra un autre règne, de

justice et de paix, s’ouvrira un royaume des cieux, un paradis, à sept niveaux, prédit le Coran, après une résurrection générale et le Jugement dernier.

Il est remarquable qu’en Europe, au xixe s., alors que les religions «tradi¬ tionnelles » paraissent reculer, ce même souffle eschatologique pénètre les idéologies politiques, les huma¬ nismes du progrès (comme cette «reli¬ gion positive de l’humanité » que pro¬ phétise et veut promouvoir A. Comte), les socialismes, en particulier le marxisme et le marxisme-léninisme, tous les «révolutionnarismes », y com¬ pris les fascismes. Ce que tous ces «mouvements » profanes, avec leurs idéologies le plus souvent ouvertement hostiles au christianisme, déterminés à l’abolir ou à le dépasser, ont en com¬ mun et ce qui fait d’eux -ironie de l’histoire -de «nouvelles » religions (ou des substituts, des ersatz religieux), c’est précisément leur conviction eschatologique. C’est elle qui leur donne une telle ardeur religieuse et fait de leurs militants des hommes de foi fanatisés, avant de devenir, à l’épreuve du pouvoir, des hommes cyniques ou, allez savoir, machiavéliques, voués à défendre coûte que coûte leurs acquis : leur «église », leur parti ou leur Etat. . .

On a depuis longtemps soupçonné le marxisme de fonctionner (dans les têtes et dans la réalité politique) comme une religion et, d’autre part, on a bien dis¬ cerné dans les écrits historiques de Marx un schème eschatologique, qui pouvait provenir de son enracinement dans la culture juive, mais on n’avait jamais mis aussi nettement en lumière que c’est essentiellement l’eschatologie qui lui fournissait, à la source, son énergie religieuse. On voit maintenant qu’eschatologie et religion sont insépa¬ rables ; que là où une pensée prend une tournure eschatologique se forme une religion ; que là où se manifeste une religion, elle contient une eschatologie qui présente une vision, une connai-sance des fins dernières de l’existence.

121

doc-ctrl/page/rotate-ccwdoc-ctrl/page/rotate-ccw doc-ctrl/page/rotate-cwdoc-ctrl/page/rotate-cw