Unpublished conference/Abstract (Scientific congresses and symposiums)Comment les investisseurs institutionnels de long terme influencent-ils les modalités de gouvernance et de stratégie des entreprises ? Compréhension du phénomène par une approche qualitative
Monaco, Carole
2016 • Colloque et séminaire doctoral international organisé en partenariat avec le centre de recherche ISEOR, Magellan, IAE Lyon, Université Jean Moulin Lyon 3, et les Divisions « Développement Organisationnel et Changement » et « Management Consulting » de l'Academy of Management (États-Unis)
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Abstract :
[fr] Dans le courant des années quatre-vingts et nonante, les systèmes financiers des pays industrialisés ont connu d'importantes reconfigurations marquées par un attrait exacerbé pour les marchés boursiers et par un processus de déréglementation financière. Ce double mouvement a provoqué le développement des marchés financiers et l'émergence de nouveaux acteurs capitalistiques : les investisseurs institutionnels, « intermédiaires financiers spécialisés dans la gestion collective de l'épargne des marchés financiers ». Lavigne (2004, p. 17) définit les institutionnels comme des acteurs qui « mettent en relation les agents à capacité de financement (les ménages) avec des agents à besoin de financement (les entreprises). Leur fonction consiste donc à investir l'épargne des ménages sur le marché financier en acquérant des titres de sociétés avec un horizon de placement de moyen à long terme ».
L'institutionnalisation des structures capitalistiques des entreprises pourrait alors laisser supposer que ces investisseurs exerceraient une influence notable sur le processus de prise de décisions des dirigeants (Benkraiem, 2007). Certains auteurs parlent d'activisme afin de qualifier « les activités les plus visibles de certains actionnaires (allant d'une surveillance limitée des compagnies à un contrôle relativement élevé) dont l'objectif est de remettre en question la gouvernance des entreprises et leur comportement » (Crète et Rousseau, 1997, pp. 871 et 952).
Dans cette logique, deux profils d'institutionnels sont généralement proposés dans la littérature. Le premier fait référence aux institutionnels de court terme dont l'objectif est de maximiser la rentabilité de leurs investissements sur une période assez courte. Ces investisseurs expriment une réticence à supporter des coûts de contrôle et votent avec « leurs pieds » c'est-à-dire qu'ils se désengagent des entreprises en cas de désaccords lourds avec les dirigeants. Le second profil concerne les institutionnels de long terme détenant des participations relativement importantes et ne pouvant agir de manière neutre. Leur influence est formalisée par une représentation plus ou moins forte au sein du Conseil d'Administration des groupes. De cette manière, ils peuvent avoir une certaine « emprise » sur les équipes dirigeantes et, in fine, influer sur la définition et l'implémentation des orientations stratégiques.
En raison de leur montée en puissance dans les structures capitalistiques des entreprises et de leur influence de plus en plus marquée, de nombreux auteurs ont étudié le rôle financier des institutionnels dans l'économie (Demarigny, 1994) et la manière avec laquelle ils impactent les performances des groupes. Les études existantes, dont la portée est essentiellement quantitative, consistent donc à analyser le lien entre leur présence et l'éventuelle amélioration ou détérioration des résultats comptables, financiers et boursiers des entreprises. Toutefois, même s'il existe des études à vocation plus qualitative, celles-ci sont peu nombreuses et relativement « anciennes » (Crète et Rousseau, 1997). L'orientation qualitative a donc été privilégiée dans le cadre de notre recherche afin d'apporter des éclairages nouveaux concernant l'influence des institutionnels sur la gouvernance et les stratégies des entreprises.
Après avoir analysé les rapports de force entre les actionnaires des entreprises du CAC 40, nous avons identifié différentes structures d'entreprises ainsi qu'un certain nombre d'institutionnels récurrents sur le marché français. De cette manière, nous avons sélectionné quatre entreprises emblématiques du marché français (présentes sur différents secteurs) au sein desquelles sont présents des institutionnels nationaux et étrangers. Ceux-ci s'y positionnent en tant qu'actionnaires de référence et peuvent être, a priori, considérés comme des institutionnels de long terme et actifs (vu l'ancienneté de leur prise de participation).
La méthodologie utilisée emprunte des facettes de la « Grounded Theory », dont l'objectif consiste à comprendre et théoriser le phénomène au départ du vécu des acteurs en présence. Dans cette logique, nous avons interrogé un certain nombre d'intervenants centraux tels que les équipes dirigeantes des fonds d'investissements étudiés et celles des entreprises au sein desquelles les institutionnels se positionnent. Nous avons également interrogé des « parties prenantes » exogènes, à orientation actionnariale, dont la vision nous a permis d'identifier des éclairages complémentaires.
Nous montrons ainsi que la logique d'investissement des institutionnels étudiés ne se réduit pas nécessairement à l'unique objectif de création de valeur boursière. Dans cette optique, des efforts de contextualisation ont été entrepris afin de coller, d'une part, à la réalité entrepreneuriale et, d'autre part, au profil actionnarial considéré. Il ressort de notre étude que les investisseurs institutionnels - même s'ils sont mus par un objectif lucratif - vont également accompagner les équipes dirigeantes des entreprises afin de permettre le développement de leurs activités. De plus, l'effort de théorisation (via un mind mapping), nous permet également d'affiner certaines théories préexistantes.
Event name :
Colloque et séminaire doctoral international organisé en partenariat avec le centre de recherche ISEOR, Magellan, IAE Lyon, Université Jean Moulin Lyon 3, et les Divisions « Développement Organisationnel et Changement » et « Management Consulting » de l'Academy of Management (États-Unis)